10 04 2015
Sur le mythique album des Beatles Sergeant Pepper’s Lonely Hearts Club Band, il y a une chanson dont j’anticipe le fait qu’elle me brisera le cœur d’ici une dizaine d’années, quand ma fille adorée – actuellement âgée de huit ans – mettra les voiles. Cette chanson s’appelle « She’s Leaving Home », la complainte de parents effondrés parce que leur progéniture ingrate les laisse seuls face à leur destinée de futurs macchabées.
Bon, je sais, ceci est une chronique paraissant dans un journal économique, pourquoi irais-je donc vous bassiner avec les Fab Four de Liverpool ?
Eh bien tout d’abord parce que Bruno Colmant fait la même chose à longueur d’année, sans que sa crédibilité n’en prenne ombrage. Je sais de source sûre que c’est en hommage à « Taxman », sur l’album Revolver, qu’il eut l’idée d’inventer les intérêts notionnels, par pur esprit de contradiction.
Mais surtout, cette semaine, dans l’actualité, le rapport père/fille a été au centre des débats, et sur trois sujets distincts, c’est donc qu’il y a anguille sous roche (ne cherchez pas dans cette expression de jeu de mots alambiqué, Bruno Coppens est en vacances).
D’abord, nous apprenons que Barack Obama pleure à chaudes larmes de manière quotidienne en pensant au jour très proche où sa fille aînée, 16 ans, quittera le nid familial, peut-être pour aller étudier en Iran, maintenant que les relations entre les ayatollahs et le grand Satan sont pacifiées. D’un autre côté, je la comprends, Miss Obama junior : vous l’imaginez, en 2017, à devoir rester à la maison toute la journée en supportant son traîne-savate de paternel, prépensionné à 54 ans, sans que Daniel Bacquelaine ne vienne lui demander de se bouger le train ?
Aucune allusion ici à ceux de la SNCB, qui ne bougent pas beaucoup, et en tout cas rarement de manière ponctuelle, car c’est un autre débat.
Dans ce pays de gauchistes que sont les Etats-Unis, personne pour oser dire à Barack d’arrêter de procrastiner, affalé dans le canapé à regarder le baseball à la télé en bouffant des hot dogs, avec les doigts et sans couverts, ne confondons pas avec un autre futur chômeur, David Cameron.
Car dans le rapport père/fille, la force de la jeunesse s’accommode rarement du poids des ans accablant la génération précédente. Prenons l’exemple de Marine Le Pen, bien consciente que garder son géniteur au FN revient à se fourrer le doigt dans l’œil, au risque de terminer comme lui : borgne. Ca y est, il lui aura fallu 47 ans, mais Marine se rebelle enfin contre la statue du Commandeur – ou de la Kommandantur, pour être plus précis. Vous allez voir, si ça continue comme ça, elle qui a eu le malheur d’être née à Neuilly juste après Mai 68, elle va virer à l’extrême gauche. Ah non, en fait, c’est déjà le cas. D’ailleurs elle siphonne sans relâche les suffrages autrefois communistes, grâce à son idéologue médiatique Eric Zemmour, lui qui réussit l’exploit d’être applaudi par Le Figaro et honni par le PTB alors qu’il vient de pondre un pavé – mais sans la plage en-dessous – hostile au libéralisme et à l’économie de marché, favorable à la reprise en main de la société par l’Etat, et dans lequel il nous gratifie, cerise sur le gâteau, d’une hagiographie de neuf pages de… Georges Marchais, si si !
Enfin, la dernière relation qui mérite de passer sur le divan, c’est celle entre la Grèce et l’Europe. Sauf que là, il s’agit du rapport mère/fils, assez complexe lui aussi, entre Mutti Merkel et Alexis Tsipras, qui traite Angela de nazie parce qu’elle refuse de lui donner plus d’argent de poche. Opportuniste en diable, Tsipras court se réfugier chez son père de substitution, Vladimir, auquel il susurre : « Well the Ukraine girls really knock me out, they leave the West behind. ». C’est tiré de « Back in The USSR », évidemment.
Bon je vous laisse, je passe mon samedi avec ma fille… pendant que c’est possible, pour quelques années encore…